lundi 7 novembre 2011

Expérience

Déjà enfant, j'avais observé une totale dichotomie dans mes expériences. Je me sentais tout à fait détaché, en parfaite harmonie avec l'univers, et la minute suivante, je sombrais dans le plus sombre désespoir et je voulais disparaître, mourir. Du bonheur paradisiaque à la tristesse suicidaire.

Bien sûr, je ne voulais vivre que les moments agréables. Et ce souhait déclencha la recherche. Non pas de la vérité ou de la libération, vois-tu, mais du bonheur permanent, de l'abolition de la souffrance. Dès le début, ce fut mon but.

Ce qui impliquait la recherche de moyens et d'outils appropriés. D'abord le sexe : cette expérience me révéla que la soi-disant petite mort, ou orgasme, est une satisfaction fort passagère, et qui dépend d'un partenaire. Ce n'était donc pas une solution. 

Puis à travers les drogues, qui peuvent créer un état libre de souffrance. Mais par la suite, lorsque leurs effets s'estompent, il reste encore plus de souffrance.

L'affection ou l'amour des amis, de la famille ou d'un partenaire perdit aussi de son sens lorsque je constatai que mon bien-être dépendait de leur comportement. Cela ne résolvait pas non plus mon problème.

Puis je commençai à lire des livres ésotériques, principalement sur la religion, les shamans, la magie, etc. Pendant toute une période, je fus fasciné par Castaneda, don Juan et la notion de liberté.

Jusqu'à la fin des années 70, où je pris soudain conscience, au cours d'un rêve, que j'étais en train de rêver. C'est alors que je me souvins d'une technique de don Juan qui consistait à observer ses propres mains tout en rêvant. Je soulevai alors mes mains pour les examiner.

Tout à coup, quelque chose qui jusque-là avait paru dormant, s'éveilla en moi ; et dans cet éveil, d'abord mes mains, puis mon corps tout entier, commencèrent à se dissoudre.

Je reconnus la mort. Et cette constatation déclencha instantanément la peur. Tout d'abord, je me débattis pour sauver ma vie avec une énergie que je n'avais jamais connue auparavant. Une force inexplicable, qui m'apparut comme un vide noir, était sur le point de m'exterminer. Même après m'être réveillé, le combat persista dans mon lit.

Ensuite, après ce qui parut durer cinq heures, une acceptation de cette extinction survint brusquement, et ce qui avait pris la forme d'un vide noir se transforma en lumière éblouissante : c'est ce que j'étais devenu. Une lumière brillant de son propre éclat.

Karl Renz

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