Incarner la réalisation

Sur ce blog et d'autres semblables, nous parlons beaucoup de l'éveil à notre vraie nature, de voir enfin à travers l'illusion d'un "je" séparé. Pour ceux qui n'ont pas encore pleinement réalisé cela pour eux-mêmes, l'idée peut surgir qu'une fois qu'une personne voit ceci, alors elle devient un être humain parfait, un «produit fini» pour ainsi dire. Dans mon expérience, ce n'est certainement pas le cas, et je pense que ces idées peuvent être dangereuses.

Il est vrai qu’il y a une vision définitive à travers le «je» illusoire . Ceci s'est passé pour moi il y a une quinzaine d'années, et la validité de cet insight est restée constante depuis lors. J'ai, cependant, continué à me développer comme une personne. C'est un paradoxe que, bien que le «je» soit fondamentalement irréel, nous ayons encore à fonctionner en tant que personnalité individuelle dans la vie quotidienne. L'idée qu’après l’éveil nous disparaissons en tant qu'individu est une erreur qui semble conduire à des réflexions un peu ridicules. J'ai vu une interview de l’enseignant non-duel Rupert Spira, dans lequel il  racontait comment quelqu'un a suggéré qu'il (Spira) n'avait pas réalisé sa nature non-duelle, car il était encore accro à la nourriture!

Bien que de telles anecdotes soient assez amusantes, il y a un côté plus sombre à ce genre de  fondamentalisme non-duel. Il est facile après la réalisation de la nature non-duelle des choses de se coincer dans l'idée de «vide», l'irréalité des individus distincts. Cela peut conduire à traiter les autres sans pitié, pour ne pas être touché par quoi que ce soit. Je pense que c'est la raison pour laquelle de nombreux enseignants, apparemment réalisés se font prendre dans des comportements scandaleux, causant parfois des torts considérables à leurs familles, aux étudiants, et à eux-mêmes.

Certains enseignants parlent d’”incarner” notre réalisation, ce qui signifie à mon avis utiliser l’insight de notre vraie nature pour notre interaction quotidienne avec les autres. Par exemple, j'ai trouvé que la réalisation de l'unité de tous les êtres m'a amené à  beaucoup plus de compassion. Il y a de nombreuses autres attitudes que j'ai développées depuis l'éveil, ce qui me donne à penser qu'il n'y a pas une chose telle qu’une personne «finie» ou parfaite, éveillée ou autre.

Ainsi, bien que cela soit paradoxal, voir l'irréalité du soi semble être un point de départ pour se développer en tant qu'être humain.

Paul

Page originale traduite par Christine – Vous êtes invités à partager ce texte à condition de respecter son intégralité et d'en citer la source: http://du-tout-et-du-rien.blogspot.com/